Le Père Juliân Carron devant la basilique Saint-Pierre de Rome, en 2015.

Julián Carrón : « La vie des chrétiens fascine-t-elle encore ? »

L'interview de Famille Chrétienne à Julián Carrón sur la perte d'attraction du christianisme en Europe

Clotilde Hamon

À l’occasion du rassemblement de Rimini, le responsable du mouvement Communion et Libération s’interroge sur la perte d’attraction du christianisme en Europe. C’est de rencontre et non de discours que l’homme a besoin aujourd’hui.

De quoi l’Europe souffre-t-elle le plus aujourd’hui ?
L’Europe souffre de confusion. Nous avons du mal à cerner le mal-être ambiant. En même temps, malgré cette situation qui aurait pu amener le scepticisme et le doute, je perçois une attente qui demeure.
Je suis frappé qu’un auteur comme Michel Houellebecq, avec tous ses problèmes existentiels, ait écrit dans une lettre publique : « Il m’est difficile d’admettre que j’éprouvais depuis toujours et très souvent le désir d’être aimé. Un minimum de réflexion va me convaincre tout naturellement chaque fois de l’absurdité d’un tel rêve : la vie est limitée et le pardon impossible. La réflexion ne peut rien y faire. Le désir persistait et je dois confesser qu’il persiste encore. » Le cœur de l’homme résiste avec toute son attente, avec son cri. Aucune confusion ou fatigue n’arrive à l’achever de façon définitive. Plus on va au fond de la crise, plus émerge ce caractère irréductible de l’homme.

Qu’est-ce qui n’a pas marché dans l a transmission chrétienne ?

Souvent, nous avons fourni des réponses sans véritable emprise sur cette attente que l’homme a en lui. Le grand théologien Hans Urs von Balthasar disait : « Dans un monde sans beauté, même le bien a perdu sa force d’attraction. » C’est pour cela que l’homme reste perplexe.
Privé de sa capacité à faire émerger la beauté du monde, le christianisme se réduit à une éthique et à un discours qui sont incapables d’attirer et de prendre le cœur de l’homme. Ce n’est plus le christianisme mais la doctrine kantienne, et c’est ce qui, à mon avis, nous a conduits à cette situation d’effondrement général.

Quand ce mouvement s’est-il amorcé ?

Après la rupture de l’unité européenne par la Réforme protestante et ensuite par les guerres de Religion, les Lumières ont tenté de sauver les valeurs en dehors des confessions religieuses. Nous avons essayé de nous mettre d’accord sur certaines valeurs pour ne pas nous faire la guerre en permanence.

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