« Laisse-le faire. Lui seul sait ce qui est le mieux... »

PAR ICI (association qui contribue à l'éducation et au réveil culturel des jeunes de familles en difficulté) est né du désir de communiquer la beauté que nous vivons et voyons. Ce désir, mis en action, nous a transformés, changés.
Alessandra Guerra

En premier lieu, nous avons cherché à faire une grande fête en dépensant le moins possible pour récolter plus d'argent pour l'association. Certains sont allés chez le fleuriste pour demander des fleurs invendues en fin de journée, d'autres ont fait les magasins du quartier pour demander des lots pour la tombola. Certains ont préparé toute la journée précédente des centaines de cupcakes, et d'autres encore ont préparé les chants Puis il y a ceux qui ont passé des soirées entières à faire le film qui raconte toutes les journées passées avec les jeunes... Ça a été une occasion pour découvrir la générosité des personnes et nous avons été surpris des réactions de solidarité ! Nous nous sommes émus de voir combien l'homme a en lui un vrai moteur d'amour. En réveillant le cœur de l'homme, nous nous sommes réveillés nous aussi : nous avons décidé que ce geste serait avant tout une possibilité pour inviter les amis, les collègues de travail, les voisins, les paroissiens. En somme, nous voulions proposer cette fête surtout à ceux qui ne connaissent pas notre expérience dans le mouvement. Le défi a été accepté. Peu d'amis extérieurs sont venus. Mais l'important était que nous nous sommes vraiment mis en jeu en nous interrogeant sur la raison pour laquelle nous avons tant d'affection pour cette caritative, au point d'avoir le désir de témoigner à tous notre expérience.

Nous voulions que cette fête soit différente pour qu'elle nous aide à comprendre le message que le pape nous a donné le 7 mars à Rome. Que veut dire se décentrer par rapport à la méthode et remettre au centre le Christ quand depuis 5 ans, un dimanche par mois, nous refaisons la même chose, avec les mêmes amis, avec les mêmes enfants, les mêmes idées, les initiatives toutes plus belles les unes que les autres, etc... ? Comment faire pour que cette caritative devienne un moment pour moi, pas du groupe ou du mouvement, pas mécanique ? Comment est-ce que je me sens responsable de cette œuvre ? Moi, qu'est-ce que je veux ? Je veux vivre avec le Christ à mes côtés. Mais Lui est là dans tous les cas. Mais, moi, comment est-ce que je le reconnais ? En le laissant faire parce que Lui seul sait ce qui est le mieux. Voilà : cette journée sera la Sienne. Nous ne serons que ses mains, ses chants, son cœur. Et la bonne volonté. Pourtant, tout en me disant cela, combien de fois en préparant la fête avec le groupe d'amis, je partais au quart de tour : « Mais non, ce n'est pas comme ça que l'on fait la tombola ! Mais comment ça, du papier transparent pour les cadeaux ? Mais ce n'est pas possible, on ne coupe pas les fleurs comme ça ! Tu as contrôlé si le matériel pour le film fonctionne ?... ». En bref, j'étais devenue un vrai casse-pieds. Mes amis réagissaient avec un sourire et j'entendais une voix en moi qui me disait « Laisse faire, laisse-Le faire ». Et je me calmais. Et le voilà en action, Il était partout et partout où Il passait tout était beau. C'est sûr, ce n'était pas parfait, alors que « mes idées étaient parfaites » et tout aurait été parfait si les amis avaient suivi à la lettre mes indications. Mais avec quel résultat ? Conflits, tensions, blessures, jeux de pouvoir. La perfection peut être diabolique si elle devient le centre des objectifs. Alors que nous, nous avons eu quelques imperfections, beaucoup d'imprévus et certains détails n'étaient pas bien réglés. Mais notre unité, signe de Sa présence, était très belle, bien présente et visible. « Laisse-Le faire ! » a été pour moi la chose principale. Je suis toi qui me fais.

Puis, il s'est produit quelque chose d'exceptionnel qui aurait pu rester comme un simple croisement de deux personnes. Pendant que nous préparions le matin la salle et les petits fours avec les jeunes, une femme est apparue à la porte. Je lui dis que la fête commence à 15h. Elle ne vient pas pour la fête, me dit-elle, mais seulement en « pèlerinage » pour revoir le local où son fils venait quand il était petit et faisait du scoutisme. Il était content à cette époque, il était très impliqué dans la paroisse... Maintenait, il est parti étudier, d'abord à Londres, et maintenant en Italie. Mais il a quitté l'Église, il ne fait plus rien, il est seul... Une mère nostalgique et triste de la tristesse de son fils. Je prends au sérieux cette tristesse. Nous échangeons deux mots puis je conclus en disant que nous avons beaucoup d'amis en Italie... Je lui propose de revenir à 15h pour la fête, je lui donnerai les adresses. A 14h58 Anne était de nouveau là. Perdue au milieu des gens, elle ne connaissait personne. Je l'installe près d'un couple que je connais. La fête commence. Présentation du geste, café, gâteaux préparés le matin avec les enfants, chants et tombola, rires, allégresse. Nous avions préparé les jeunes pour faire le service à table. Tabliers, bloc notes pour les commandes. Au début, les jeunes sont super stressés et ne veulent pas le faire. A la fin, pris par le « jeu », ils font la course et se querellent pour servir en premier. Puis, il y a le film qui émeut tout le monde. Un garçon, les larmes aux yeux dit « Je ne savais pas que c'était aussi beau ce que nous avons fait toute cette année ! ». A la fin, Anne vient me voir, toute chamboulée par la fête : « Ça a été un très bel après-midi ! Qui l'aurait dit ? Si quelqu'un me l'avait prédit ce matin, je l'aurais traité de fou. J'étais tellement déprimée ce matin... Et au contraire, maintenant, j'ai l'impression de vous connaître depuis toujours ! Je me suis sentie chez moi. Je veux la même chose pour mon fils. Donnez-moi le téléphone de vos amis en Italie ».

Quelques jours plus tard, Anne m'a appelée : « Mon fils a rencontré votre jeune ami, il est très content ! Je vous ai entendue parler d'une journée de fin d'année de votre mouvement... je peux venir moi aussi ? ».

Ce matin, en prenant le métro, je me découvre différente. Je ne suis plus fâchée comme tous les matins. La journée commence avec tous ses problèmes, mais je découvre l'aventure de la journée et, comme à la chasse au trésor de ma lointaine jeunesse, je suis toute en tension pour Le chercher. Je regarde les personnes dans les yeux en remerciant les rares passants qui me tiennent la porte ou me laissent une place pour m'asseoir, je souris à celui qui me rentre son coude dans le dos et je remercie intérieurement que ce coude me rappelle que Lui existe, je donne de la monnaie à un clochard (dont je pensais hier qu'il était un feignant bon à rien...) en lui souhaitant une bonne journée... Mais pas comme une banale « bonne éducation ». C'est la découverte de la beauté de vivre dans toute son inventivité et sa créativité. Ce matin, j'ai redécouvert combien cela vaut la peine de vivre, avec la Christ à mes côtés, avec les yeux et le cœur pleins de la beauté que Lui seul a pu me montrer hier dans cette journée de fête.

Et je comprends que ma responsabilité est vraiment dans le fait de reconnaître que PAR ICI, cette caritative, est un instrument qui me fait grandir dans la foi, c'est à dire qui m'éduque à remettre le Christ au centre, à « Le laisser faire ». Je ne vais pas là-bas pour me faire plaisir ou pour satisfaire mon amour propre. Cette initiative a été pensée pour intéresser encore plus, pas seulement chaque personne qui participe mais aussi les spectateurs, à cette grande chose qu'est la présence du Christ à qui notre vie et celle du monde appartiennent. Car si le Christ était plus reconnu, nous irions tous mieux, cent mille fois mieux sur cette terre.