Dîner caritatif de soutien aux réfugiés irakiens

A l’approche de Noël CL de Paris avait organisé un dîner de soutien aux chrétiens d’Irak : gastronomie orientale au menu, générosité et partage au programme.
David Victoroff

Quoi de commun entre un bel appartement parisien de la rue de Saint-Pétersbourg et les logements d’Erbil dans lesquels se réfugient les familles chrétiennes qui fuient l’avancée de Daech au nord-est de l’Irak ? Rien, sinon que les convives français ont, ce soir du 13 décembre 2014, voulu communier en pensée avec ces réfugiés et les aider financièrement, à la mesure de leurs moyens.

Pas évident de concilier la joie de l’approche de Noël et la tragédie qui a frappé la chrétienté d’Irak au cours du second semestre 2014. Pourtant, les organisateurs avaient fait de leur mieux pour que l’ambiance soit à la fête : tables somptueusement dressées, apéritif où abondaient les zakouskis, canapés, petits fours et autres gâteries… Dans son mot d’accueil Nathalie avait bien rappelé l’esprit de la soirée : quand on a beaucoup reçu, on donne.

Le premier don, on le doit à l’association Point Cœur et à sœur Claire qui nous ont accueillis dans ce beau lieu. L’équipe aux cuisines menée par la charmante Caroline, irakienne, avec les amis de Communion et Libération, qui ont aidé et servi, se sont aussi « donnés » à cœur joie. « Farandole de mezzés », ces hors d’œuvres orientaux qui à eux seuls suffisent largement à rassasier les plus exigeants, galettes à la viande araméennes confectionnées avec passion dans le respect de la tradition vieille de plus de 2000 ans, plat principal de viande de veau accompagnée de son riz basmati à l’aneth, thé à la menthe gourmand servi avec des pâtisseries arabes… Tout était fait pour que, l’espace d’un repas, on se trouve transportés par les saveurs des mets du côté de Ninive, du temps où chrétiens et musulmans vivaient en paix et où personne n’était obligé d’abandonner en hâte un repas de noce pour fuir l’arrivée de hordes barbares, comme ce fut le cas en août dernier.

Certes la musique n’était pas orientale. Mais quel cadeau que d’entendre Bernadette, jeune violoniste virtuose, interpréter Debussy et Lalo accompagnée par sa maman au piano (qui, par les caprices de la technique, s’est miraculeusement transformé en orgue un instant). Ou encore de goûter aux charmes des voix de la chorale italienne polyglotte interprétant tour à tour des chants en italien, en espagnol et en anglais, chants d’où le Seigneur n’était jamais absent. Comme on plaint les fanatiques de l’Islam qui interdisent la musique !

Tout cela est fort bien mais où est la solidarité avec l’Irak dans ces agapes ? Suffit-il de bien souper à l’orientale pour se sentir plus proche de ceux qui souffrent en Mésopotamie ? Sans doute la soirée aurait-elle été bien incomplète sans le bel entretien avec Monseigneur Yousif et Thomas Mirkis diffusé entre les mezzés et le plat principal.

L’évêque de Mossoul explique avec sobriété comment il a accueilli à Erbil, au Kurdistan, plus de 700 familles de réfugiés ayant dû en l’espace d’une demi-heure, abandonner tous leurs biens pour ne pas tomber aux mains des sicaires de Daech. Il donne quelques exemples concrets de l’aide apportée par l’Eglise à ces démunis : hébergement, scolarisation des enfants, dispensaire où travaillent côte à côte médecins chrétiens et musulmans. Comment aider des jeunes à passer leurs examens, comment faire pour que les retraités continuent à toucher leur pension, que les sans-papiers puissent à nouveau avoir une carte d’identité, acheter 3000 couvertures avant l’arrivée de l’hiver ? Toutes ces aides sont apportées au jour le jour et au fur et à mesure des besoins par l’Eglise en liaison avec les autorités kurdes. Tout cela coûte de l’argent, bien sûr, 1000 dollars par mois pour louer une maison dans laquelle on logera trois familles (aucun réfugié n’est sous tente), 2000 dollars tous les quinze jours pour acheter du lait pour les enfants, 700 dollars pour une seule piqûre destinée à soulager un malade atteint d’une maladie rare…

Comment vivre dans cette détresse ? Monseigneur Yousif rappelle un proverbe arabe : « Je chante au Seigneur malgré ma souffrance » et assure qu’être ensemble, c’est déjà une espérance. Il rappelle qu’au premier Noël, la sainte famille, c’était aussi des réfugiés vivant dans la précarité.

Mais comment aider face à une telle détresse ? Un repas de charité d’une quarantaine de convives, quelle que soit leur générosité ne saurait bien sûr y suffire. L’évêque, qui sait bien que le flot des médias est propice à l’oubli et qu’une information catastrophique chasse l’autre, nous demande par-dessus tout de ne pas oublier les Chrétiens d’Orient. Il nous demande aussi de prier pour eux et …de jeûner pendant la période de Noël. Ce copieux repas nous y aidera peut-être.