Nostalgie de Mossoul

« Peur ? Si tu veux vire pleinement chaque instant, tu ne peux pas avoir peur… ». Parmi les hôtes de l’Encounter, il y avait Monseigneur Nona, évêque irakien actuellement en Australie. Il parle de son peuple et de son espoir.

Il est arrivé à New York en traversant l’Océan Pacifique. Amel Shamon Nona, ancien archevêque chaldéen de Mossoul est aujourd’hui chef de l’Eglise chaldéenne d’Australie et de Nouvelle Zélande. Il vit depuis huit mois à Sydney. Avec le Père Pierbattista Pizzaballa, gardien de la Terre Sainte, il est venu à l’Encounter pour parler des chrétiens persécutés, de ses fidèles ; de ceux avec qui il a dû fuir la ville de Mossoul, et avec qui il a vécu pendant près d’un an, comme ‘évêque réfugié’.

Que signifie pour vous ‘penser aujourd’hui à Mossoul et à vos fidèles’ ?

J’éprouve de la nostalgie pour la ville et le diocèse de Mossoul qui s’étendait jusqu’à la plaine de Ninive ; et pour les gens avec qui j’ai vécu. C’était une petite communauté mais qui vivait pleinement sa vie et sa foi. J’éprouve de la nostalgie pour cette vie. Et autre chose : pour moi, c’est une douleur de voir depuis combien de temps ces gens sont obligés de vivre au nord de l’Irak. Ils habitent encore dans des pré-fabriqués ou dans les maisons louées avec l’argent de l’Eglise. Ils vivent à trois familles par maison depuis un an et demi. C’est toujours une situation terrible.

Espérez-vous que les choses puissent s’améliorer ?

Il y a toujours un espoir. Je pense que les chrétiens resteront en Irak. Il ne restera peut-être qu’une petite communauté. Mais je pense qu’il n’est plus possible de retourner à Mossoul même. Quand l’armée régulière reconquiert une ville en chassant Daech, elle détruit tout. Si Mossoul est libérée, ce ne sera plus un endroit où vivre. Pour les villes de la plaine de Ninive, en revanche, on pourra peut-être y retourner.

Si vous étiez aujourd’hui à Erbil et qu’un de vos fidèles vous disait : « Je pars, je m’en vais », que lui diriez-vous ?

Je prierais avec lui et je lui dirais : « Que Dieu soit avec toi ! » Nous ne pouvons malheureusement rien dire d’autre à ces personnes, excepté que la chose la plus importante dans la vie, c’est la foi. Qu’elles restent ou qu’elles partent. Notre terre, notre histoire, c’est la foi chrétienne : elle est ce que nous avons de plus cher.

Qu’ont été pour vous ces huit mois à Sydney ?

Je suis allé en Australie pour y rester. Je dois m’habituer à l’idée de devenir membre de cette société. Je suis un oriental, habitué à une vie simple, dans un pays oriental. La société occidentale est complètement différente. Je suis aidé par l’idée que je peux ‘servir’ les gens, répondre à leur besoin. Je parle surtout de l’éducation à la foi. Ils ont besoin de quelqu’un qui parle simplement et qui touche leur cœur, qui leur montre la possibilité de vivre leur foi dans la simplicité de la vie.

Que vous suggère le thème de l’Encounter, le désir d’infini et la peur de désirer ?

J’ai vécu avec Daech pendant quatre ans, jusqu’en 2014. Ils ne contrôlaient pas la ville, mais ils étaient là. Puis ils nous ont chassés. Mais, sincèrement, je n’ai pas eu peur. Vraiment. Si tu désires vivre pleinement chaque instant de ta vie, il n’y a pas de place pour la peur. Par conséquent, je suis sincère, je ne comprends pas bien comment vous pouvez parler de peur ici, en Occident.

Avez-vous remarqué quelque chose d’intéressant dans cette manifestation ?

Il y a beaucoup de jeunes. C’est vraiment bon signe.