Le miracle de l'accueil

Qu’est-ce qui fait que quelqu’un qui a déjà sept enfants vienne faire de l’assistanat toute la nuit et s’en retourne à son travail le lendemain, tout cela sans être payé ?

Cher don Julián, il y a un peu plus d’un mois, une assistante sociale a appelé mon mari pour lui parler d’une petite fille étrangère, âgée de trois mois, ayant de graves problèmes physiques et qui avait été abandonnée par ses parents. Une grand-mère s’occupait d’elle 24 heures sur 24, mais elle était épuisée et devait reprendre son travail. Comme nous faisons partie de l’association “Famille pour l’Accueil”, elle lui a demandé si nous connaissions une famille disposée à accueillir cette petite, et si nous pouvions aussi trouver du monde pour assurer quelques heures de présence à l’hôpital. Et tout cela en extrême urgence ! Après avoir été mise au courant par mon mari, ma première réaction a été : « Et si on la prenait chez nous en attendant de lui trouver une famille ? ». Mais j’ai aussitôt pensé à ma propre famille – j’ai sept enfants – et j’ai compris que je ne pouvais pas répondre moi-même à ce besoin, que je devais le partager avec mes amis. J’ai donc envoyé un courriel aux adhérents et aux sympathisants de l’association et – premier miracle – j’ai immédiatement reçu une dizaine de réponses du genre : « On est là : dis-nous ce qu’on peut faire ». Très rapidement, nous avons organisé des tours de garde à l’hôpital, et avec une trentaine de personnes nous avons pu assurer une présence permanente. Au-delà de mon étonnement, qui m’a fait reconnaître à nouveau qu’il suffisait de dire “oui” et que c’était le Seigneur qui accomplissait, il y a eu aussi l’étonnement de l’assistante sociale qui m’a dit : « Et moi qui ne croyais pas au Père Noël… ! » Je lui ai répondu du tac au tac : « Moi, je l’appelle l’enfant Jésus ». Même dans le service, médecins et infirmiers ne comprenaient pas ; ils essayaient de nous cataloguer par rapport à ce qu’il connaissait déjà, mais cela ne collait pas, face à tant de pères et de mères de famille, de jeunes et de moins jeunes : certains étaient là pendant quelques heures, d’autres des nuits entières à veiller sur la petite... Et cela a fait naître des questions chez le personnel hospitalier : « Qu’est-ce qui fait que quelqu’un qui a déjà sept enfants vienne faire de l’assistanat toute la nuit et s’en retourne à son travail le lendemain, tout cela sans être payé ? » Une autre chose émouvante est le fait que les bénévoles, une fois leur tour de garde terminé, et malgré la fatigue accumulée parce que la petite ne dort pas beaucoup, sont très heureux et nous écrivent pour nous remercier de leur avoir permis de participer à ce geste. Et la liste des volontaires s’étend maintenant au-delà des “Familles pour l’Accueil” et du mouvement. Une amie m’a dit un jour, après que son mari soit rentré de l’hôpital où il avait veillé sur la petite : « Sais-tu qu’il est revenu heureux ? Et ce genre de choses, il ne les avait jamais faites, pas même pour nos enfants ». Il y a quelques jours, les médecins, étonnés par ce turnover continuel, mais soucieux de ne pas avoir trop de monde, nous ont demandé, avec beaucoup de gratitude, s’il n’était pas possible de réduire le nombre de personnes en amplifiant les heures de permanence. À ma grande surprise, je ne me suis pas inquiété pour la suite, certaine que le Seigneur accomplirait ce qu’il avait commencé. Et en effet, il y a déjà deux familles disponibles, prêtes à prendre l’enfant avec elles. Une autre chose qui me touche concerne le garçon de treize ans qui nous a été confié : même lorsque tout ressemble à une défaite, je ne peux que remercier, parce toutes les questions qui surgissent grâce à lui trouvent leur synthèse dans la demande que Dieu vienne accomplir ma vie et la sienne. Il est impressionnant de constater qu’en demandant la grâce d’une attitude docile et curieuse, Il se sert de tout pour me regarder et Se faire apercevoir. Des évènements ou des rapports en apparence négatifs, des situations miraculeuses, aussi bien que le banal du quotidien, engendrent et renouvellent même les “rapports habituels”, rendent aimable ce qui était intolérable, surprenant ce qui était imprévisible. Je remercie le Seigneur de m’avoir fait voir autant de miracles.

Roberta, Rovereto (Trente)