L'ami exceptionnel à la sortie de l'église

Je viens dire à Jésus: “Toi en moi et moi en Toi”, et à ma mère Marie, “je suis ton fils et toi ma maman

Esteban est un ami très spécial. C’est un paroissien fidèle de notre communauté à Ingeniero Maschwitz, en Argentine. On le voyait tous les jours à la messe ou à l’adoration eucharistique, à genoux au dernier banc à l’église. Mais on le retrouvait aussi à la sortie de la messe, en train d’attendre l’aumône des amis et fidèles qui l’approchaient avec de plus en plus de familiarité. C’est une personne que nous pourrions définir indigente. Il y a quelques années, on était assis sur le même banc, en train d’écouter une chorale qui chantait la Misa Criolla. Quand on est arrivés à l’«Agneau de Dieu qui enlèves les péchés du monde, ais pitié de nous», j’avais été très émue face à la profondeur de cette demande et à la beauté de la musique. A mon côté, Esteban pleurait du même émoi. J’ai donc commencé à le regarder comme un vrai ami, étonnée de son “être”, du mystère infini de cette personne, si différente et en même temps si identique à moi. Chaque dimanche mon mari Fernando et moi, et puis nos enfants, nous parlions avec Esteban, qui avait fini par apprendre tous nos noms et dates d’anniversaire. Il habite une maisonnette en bois (maintenant un peu améliorée grâce à nous et à nos amis), dans un quartier de la périphérie, d’où il marche tous les jours vers la paroisse, le long de 30 regroupements de maisons (avec beaucoup de difficultés physiques suite aux séquelles d’un a.v.c). Un jour je lui ai demandé: «Pourquoi fais-tu ce sacrifice?». Il m’avait répondu: «Je viens dire à Jésus: “Toi en moi et moi en Toi”, et à ma mère Marie, “je suis ton fils et toi ma maman”». Cette année-ci on l’a invité aux vacances du mouvement. Au retour il nous a remerciés de lui avoir donné la possibilité de connaître le “ciel”. Après quelques jours, sa santé a fléchi et il ne pouvait plus marcher. Mon mari et deux autres personnes de la communauté ont été le voir. Ses conditions étaient terribles, il déprimait et avait presque envie de se laisser mourir. Alors avec une infirmière à la retraite et une sœur de la paroisse on a été le voir pour l’aider. Je me préoccupais pour son âme et on l’a même accompagné se confesser. Après ce moment, un grand nombre de faits se sont passés. Chacun d’eux mériterait une lettre. Le fait le plus significatif, pour la grâce qu’on a reçu, a été de l’accueillir chez nous pendant trois jours (il n’a pas voulu rester plus longtemps, soucieux comme il était de notre vie familiale). Sa dignité humaine était intacte. Nous avons assisté à un spectacle de charité, attention et unité de la part des amis (qui le lavaient, le soignaient etc.). Cette “caritative” a été un cadeau pour nous, on y apprend l’Amour, cette leçon fondamentale qu’on retrouve dans le sens que Jésus donne à la vie.

Carolina, Argentine