Au cours d’un examen oral de fin d’année, une de mes élèves du lycée me dit à la fin de l’épreuve que Leopardi est vraiment intéressant et « réaliste par rapport à la vie ». Moi, un peu surpris, je feuillette dans mes notes et trouve la photocopie des premières six à sept pages du Triduum de Jeunesse Etudiante. Je les lui passe en la priant de me dire ce qu’elle en pense. Voici le texte qui m’est parvenu quelques jours plus tard: « Bonjour prof. Je veux vous dire que la lecture des feuilles m’a fait réfléchir à certaines choses et m’a surtout aidé à trouver des réponses ou au moins m’a permis de partager les demandes qui m’assaillent. Je pensais être anormale parce que je ne trouvais personne qui comprenait les sensations d’un manque que moi j’éprouvais. Les autres cherchaient à me consoler croyant que j’étais triste pour des choses tout-à-fait superficielles et j’ai commencé à les détester en me disant : ‘Mais est-ce possible qu’ils soient si stupides, superficiels, immatures ?!’. Et tout me dérangeait, même embrasser une amie car cela me semblait pitoyable. C’est impressionnant de voir comment ce texte décrit les différentes phases par où je suis passée, il me semble que c’est moi qui l’ai écrit : du sentiment de s’être perdu et vidé par la rage pour n’importe quoi ; du passage d’un sentiment d’abandon à une attitude de ‘faire semblant de rien’ et de n’en avoir rien à faire ; enfin la recherche d’un conformisme pour être comme les aux autres, pour être heureux et pour éliminer les demandes. Mais ce qui est fantastique c’est que le texte m’a fait comprendre que j’ai rejoint la phase dont il parle à la fin, et j’en suis soulagée : tout cela fait partie de l’humain vrai et je suis contente d’être passée par le pessimisme parce qu’ainsi je puis accueillir mieux la raison positive ou plutôt réaliste pour laquelle il faut croire et agir afin d’arriver à quelque chose ; il ne se passe rien si on reste planté dans un coin, cela vaut pour tous les domaines de la vie ».

Pierluigi, La Spezia