Ce que j'ai à voir avec les périphéries...

Les périphéries, c’est nous, car il ne faut pas croire que tout va bien pour nous : j’ai en moi un manque, que j’essaie souvent de combler avec de nombreuses petites illusions

Cher don Carrón, au Meeting de Rimini, j’expliquais l’exposition de l’AVSI (Association de bénévoles pour le service international). Dès que j’ai eu connaissance du titre : « Vers les périphéries du monde et de l’existence. Le destin n’a pas laissé l’homme seul », je me suis rendu compte que le mot “périphérie” me dérangeait. Je pensais qu’il n’avait de sens que pour les volontaires de l’AVSI. Je me demandais ce que j’avais à voir avec tout ça. Qu’est-ce que je pouvais bien faire, moi, pour les périphéries ? Qu’est-ce que je devais faire ? Or je devais expliquer l’exposition, et le faire du mieux possible. Mais, plus je m’y efforçais, plus je ressentais de distance entre mon incapacité et ce que j’aurais voulu communiquer. Pourtant, au cours de la rencontre sur Giovannino Guareschi, j’ai entendu une phrase qui m’a illuminée : « Les périphéries, c’est nous, car il ne faut pas croire que tout va bien pour nous : j’ai en moi un manque, que j’essaie souvent de combler avec de nombreuses petites illusions. Ce qui me manque, c’est ce qui me permet d’être un homme ». Ou encore : « Si les périphéries existent, il existe aussi un centre ; et ce centre, c’est mon humanité ; ce centre, c’est le Christ ».
S’il y a une chose que j’emporte avec moi en partant, c’est ceci : je suis une des périphéries, je suis pleine de ‘besoin’, mais j’ai découvert que c’est la condition où nous met Jésus pour nous attirer à Lui. Si nous sommes avec Lui, nous avons tout. Il suffit vraiment de l’attirance de Jésus pour pouvoir faire face aux contradictions du monde. Cette attirance nous pousse à risquer, paradoxalement ; elle nous aimante. Nous pouvons sortir vers les périphéries du monde, les périphéries de notre université, de notre famille, de nos amis, les périphéries de nous-mêmes. C’est une attirance vertigineuse qui accentue la perception de notre péché et de notre besoin, mais c’est, en même temps, une attirance pleine de miséricorde.
Le dernier jour du Meeting, il s’est passé un fait insolite. Tout en présentant l’exposition, je me rendais compte que j’avais commencé à vivre ce que j’étais en train de raconter. Et ce changement en moi était si perceptible qu’à la fin, de nombreuses personnes sont venues me remercier et me poser des questions sur l’exposition. Sur le moment, j’ai éprouvé un grand sentiment d’embarras. Dès que j’ai pu, je suis sortie fumer une cigarette et je me suis éloignée de la foule. Je me sentais étrangement émue. Et je ne comprenais pas pourquoi. Cinq minutes après, un ami, qui travaillait avec moi, m’a raconté ce qui lui arrivait, et, se référant à la phrase de l’Évangile, il me dit : « Jésus fait toute chose nouvelle ». Je me suis rendu compte alors de quelle émotion il s’agissait pour moi. J’aurais voulu retourner dire à ceux qui m’avaient félicitée : « Ne me remerciez pas ! Remerciez Jésus qui fait toute chose nouvelle. Il fait même nouvelle quelqu’un comme moi ».
Et voici la découverte que j’ai faite : le chrétien n’est pas celui qui ne se trompe jamais, mais celui qui vit continuellement l’expérience du pardon, l’expérience de Jésus qui fait toute chose nouvelle. Le Destin ne nous laisse pas seuls : il nous cherche continuellement pour nous rendre nouveaux et pour faire de nous des instruments qui témoignent de Sa compagnie.

Giulia