Chartres pour moi

Témoignage sur le pèlerinage à Chartres de la communauté francophone de Communion et Libération

Je le dis sans ambages, au risque de scandaliser : je ne suis pas tellement portée à prier la sainte Vierge. Le climat bourgeois-libéral de mon milieu et mon éducation y sont sans doute pour une part. Mais cela ne veut pas dire que Marie n’ait pas de place dans ma vie. Je crois qu’elle est la mère de Jésus mais, de là à avoir une dévotion naturelle envers elle, il y a encore du chemin à parcourir, je m’en rends compte. On m’a dit un jour que j’avais toujours eu un côté bizarre et ça m’a fait de la peine. Aujourd’hui, cela ne me préoccupe plus : suivant les critères du monde, on a tous un côté bizarre, petit ou grand… Mais le Seigneur, qui nous connaît, nous accueille comme nous sommes. Moi, il m’accueille avec mon manque d’attachement sincère pour sa mère, et, tout doucement – il ne force jamais – il est en train de me changer, pourvu que je me laisse faire.
Ce chemin de « conversion » a débuté il y a trois ans avec le pèlerinage de Chartres auquel m’avaient invitée des amis parisiens. J’ai toujours été attirée par la cathédrale, ses sculptures surtout, sans y avoir mis les pieds ; je la connaissais uniquement par des représentations. Mais je n’avais jamais prêté attention à l’idée du culte de la Vierge qui en est l’origine. Ce qui m’avait incitée à participer au pèlerinage annuel, c’était bien sûr la présence des amis. Cette année, j’y suis allée pour la troisième fois, en train comme toujours. Et toujours fascinée par la beauté du site. Voir arriver devant le portail nord tous les amis – ils étaient une bonne centaine – qui avaient fait une partie du trajet à pied sous un soleil radieux cette année, (il n’est pas toujours au rendez-vous mais, ce dimanche de fin d’été, il nous a vraiment comblés) et prier tous ensemble l’Angélus a été, comme chaque fois, un moment émouvant. La messe, dans la chapelle de la crypte dédiée à Notre-Dame, avec son admirable acoustique, fut aussi un moment très fort.
En attendant près du portail royal l’heure du retour vers Paris, je me suis demandé pourquoi la rencontre avec la Vierge, en ce haut-lieu marial, ne suscite pas en moi les résistances que j’ai toujours ressenties dans d’autres lieux de pèlerinage. Je pense qu’il y a plusieurs raisons à cela. En premier lieu, la présence d’amis ; je les ai vus prier comme des enfants devant la statue de la Vierge, dans la pénombre de la grande nef et ça m’a profondément touchée. Et puis Marie demeure dans cette cathédrale, comme dans une admirable châsse de pierre digne d’elle ; si certaines représentations de la Vierge et des lieux de pèlerinage, peu attrayants selon moi, m’ont toujours un peu rebutée, ici tout est signe de la Beauté qui, par elle, est entrée dans ce monde. Enfin, à Chartres, j’ai trouvé une Vierge qui ne donne pas l’impression d’être au centre du culte. Dans ce sanctuaire, elle occupe la place qui lui revient, à côté de son Seigneur Dieu, le Christ en majesté, assis sur le trône royal ; elle est entourée d’une multitude de saints, d’anges, d’archanges et de simples mortels – rois et gens de toutes conditions – ceux qui peuplent les portails : la mère de Dieu qui relie la cité du ciel et celle de la terre où nous peinons pour accéder un jour à l’autre. Le fait que Marie soit présente à Chartres comme la servante du Seigneur et non pas comme une sorte de déesse isolée, m’a beaucoup impressionnée.
J’espère pouvoir y retourner… avec mes amis !

Klaartje, Gand