La joie de l’Évangile remplit le cœur

L’homme ne peut pas être défini par son erreur. Il est possible de renaître quand il y a une compagnie, une amitié à laquelle s’accrocher

Très chers amis,
La fête de Noël est une belle occasion pour regarder de plus près la vie autour de nous, pour regarder ce qu’un Autre suscite continuellement dans ce monde plein de contradictions et de violence.
Le Mystère de Dieu se propose toujours, Lui qui a décidé de partager l’expérience humaine en toute chose : de l’amitié à la souffrance, en passant par le travail, la trahison, et même la mort. Chaque aspect de notre expérience est traversé par la grâce imprévisible d’un Dieu qui s’est « dérangé » pour nous.
Au Centre social Edimar – aussi appelé Foyer princesse Grace –, nous sommes les témoins d’une vie qui fleurit dans des manières comme dans des temps qui nous sont inconnus et imprévisibles. Il nous est demandé d’être attentifs, comme des veilleurs toujours en alerte, pour s’apercevoir de ce qui est en train de bourgeonner et pour l’accompagner dans sa croissance.
« La joie de l’Évangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus », dit le Pape au début de son exhortation apostolique Evangelii Gaudium. Et il poursuit en disant : « L’Église ne croît pas par prosélytisme. L’Église croît par attraction. »
J’ai vu cette joie sur le visage d’un jeune du Centre qui s’était approché du sacrement de la réconciliation. C’est une vie qui grandit, comme nous le voyons souvent à la réunion du mercredi. C’est une graine qui pousse après un travail long et fatigant que la nature demande : celui de passer d’une idée négative de soi (ce qui est typique des enfants des rues et de ceux qui ont été en prison) à une perception claire et amoureuse de soi. Cela arrive dans la rencontre avec une amitié qui n’a pas peur de notre humanité. C’est ce qui est arrivé à Edimar.
La personne, le moi, renaît uniquement à partir d’une rencontre. C’est à partir de là qu’elle trouve la force pour faire face à sa réalité (famille, études, apprendre un métier…), jusqu’à ce qu’elle puisse dire : « Je prie chaque jour pour mon père, même s’il me fait souffrir. » Un jeune racontait à l’équipe des éducateurs la sensation qu’il éprouvait lorsqu’il dormait sur le trottoir et qu’il voyait défiler de grosses voitures : « Je me considérais comme l’on peut considérer un faux billet dans une banque. Mais dans la rencontre avec vous, Dieu m’a révélé ma vraie valeur. » Un autre me disait : « Dieu s’est matérialisé dans ma vie à travers l’amitié avec vous. Ma vie s’est ouverte ; maintenant elle a un sens. » Parce que dans l’amitié se révèle le Mystère qui donne un sens à la vie.
Et il y a de l’espérance aussi pour cet ami qui, en pleurant, après des années de vie tantôt dans la rue, tantôt en prison, se demande pourquoi il n’est pas aimé et prie pour son père, sans pour autant oublier que celui-ci l’attachait pour le punir lorsqu’il était petit.
Notre travail dans cette périphérie géographique et existentielle qu’est la gare de Yaoundé trouve son sens dans cette graine de vie nouvelle qui grandit inexorablement et qui ne finit jamais de nous émerveiller. L’expérience de ces années nous montre que chaque jeune que nous rencontrons a son histoire propre, pleine de souffrance ainsi que d’un grand désir de vie. L’homme ne peut pas être défini par son erreur. Il est possible de renaître quand il y a une compagnie, une amitié à laquelle s’accrocher.
Le Mystère de Noël nous dit que Dieu a commencé son amitié avec l’homme il y a 2000 ans, dans une pauvre grotte, parce qu’Il « a tellement aimé le monde qu’Il a donné son Fils ». Cela rend sûrs nos pas et remplit notre cœur de certitude.

Père Maurizio, Yaoundé (Cameroun)