La réponse d’Anna

Notre devoir n’est pas de protéger les enfants du mal, mais de leur donner des réponses, des hypothèses de sens
père Luca, Rome

Après les attentats de Paris, nous nous étions réunis entre professeurs du collège public où j’enseigne afin de comprendre ce que nous devions faire en classe. Certains disaient : « N’en parlons pas trop, ils sont petits, ils restent interdits ». J’ai pensé que dans un monde aussi connecté que le nôtre aujourd’hui, il est impossible d’éviter les problèmes et les questions. D’ailleurs, notre devoir n’est pas de protéger les enfants du mal, mais de leur donner des réponses, des hypothèses de sens. D’autres proposaient de distribuer une feuille sur laquelle répondre à la question : « Que ressens-tu face aux attentats de Paris ? », sans en parler en classe. Comme si un mélange d’émotions confuses pouvait suffire à comprendre ce qui s’était passé.
Mercredi, j’ai demandé aux élèves : « Pourquoi les événements de Paris nous semblent-ils inhumains ? » Anna, en première année de collège : « Parce que la chose la plus humaine qui soit c’est l’envie de vivre ». Avant d’entrer en classe, j’avais entendu la réponse d’un ami à la même question : « Tout est lié à l’économie. Ils se rebellent contre l’oppression capitaliste de l’Occident. Nous leur avons donné les armes, etc. ». La réponse d’Anna me semblait plus exhaustive et mature.
Alors j’ai relancé : « Pourquoi l’envie de vivre est-elle humaine ? ». Voici leurs réponses : « Parce que la vie est intéressante, elle te donne la possibilité de connaître des choses que tu ne connais pas encore », « parce que tu peux étudier, jouer, faire pleins de choses que tu ne peux plus faire quand tu es mort », « parce que c’est seulement en vivant que tu peux espérer changer quelque chose dans le monde », « parce qu’en vivant tu peux chercher les réponses aux questions que tu te poses ».