Cher Julián,
Le 3 février, Lucia, ma troisième fille est née prématurée. Entrer à l’unité des soins intensifs des nouveaux nés fut pour moi un peu comme entrer dans la quatrième dimension, car il m’a fallu découvrir comment être dans cet endroit : les lavages minutieux, le changement d’habit, parler à voix basse, les regards préoccupés des parents… Jusqu’à comment être devant la couveuse. Au début, je n’arrivais plus à respirer, je n’arrivais pas à comprendre ce qui était arrivé et j’avais une énorme angoisse. C’est devenu une demande lorsque j’ai rencontré Katy, la maman de Nathan, un nouveau-né dans un état grave, hospitalisé depuis quelques temps. Un jour, alors que je regardais Lucia et que je priais, elle est venue vers moi et elle m’a dit : « Tu es mal assise sur cette chaise ; regarde, je vais t’aider à baisser la couveuse et à te mettre plus à l’aise ». Quelques mots qui m’ont surprise parce que son fils était celui qui était le plus malade, et je pensais que Katy ne regardait que lui. Cette attention a changé ma façon d’être dans ce service. J’ai commencé à demander : « Seigneur, mon rocher, fais que je reste attachée à toi, aujourd’hui ». Et chaque jour, quelque chose est arrivé pour m’empêcher de me sentir seule face à ma douleur : Katy, mon mari, les mamans de la Fraternité de Rome et d’autres amis qui ont prié tous les jours pour ma fille. Lucia a grandi petit à petit, elle va mieux et elle est désormais à la maison. Ces jours-ci, je me suis rendue compte que ce regard réveillé dans l’unité des soins intensifs est à redécouvrir pleinement à la maison aussi. Nathan est mort et lorsque Katy me l’a écrit, j’ai pensé : pourquoi ? Une question dramatique à laquelle je ne peux pas donner de réponse mais que je garde dans la certitude que la présence du Christ est humaine, elle ne t’abandonne jamais et peut faire renaitre ton cœur. Avec Katy, nous nous parlons souvent et nous avons prévu de déjeuner ensemble bientôt.