Le poulet et le sandwich

La conscience s’élargit et reconnaît dans ton geste la valeur qui le rend vrai

Sur le trottoir, devant la maison, il y a toujours un émigré qui demande l’aumône, le plus souvent avec insistance et comme un dû. Aussi suis-je soulagée quand je réussis à me glisser dans la maison sans me faire remarquer. Ce matin, je le rencontre devant le supermarché, il m’arrête et me demande ‘un poulet rôti et un sandwich’. Je lui réponds que je lui achèterai volontiers quelque chose à manger. Mais il insiste pour obtenir ce qu’il m’a demandé. J’entre, je lui prends une ciabatta mais je ne trouve pas de poulet. En le rejoignant dehors, je lui dis qu’à la place, je pourrais lui acheter du jambon. Il soutient qu’ils vendent du poulet, entre avec moi dans le supermarché et se dirige vers le comptoir en question. Tout à coup, il voit la ciabatta, me dit qu’elle est trop petite, la remet dans le rayon et prend une baguette.
Je commence à m’impatienter mais je ne me sens pas la force de me lancer dans une discussion. Mécontent, il disparaît et revient avec une bouteille d’eau. je sens la moutarde me monter au nez et je me dirige vers les caisses, mais une voix m’interpelle : “Madame, s’il vous plaît !” C’est une employée qui fait de la publicité pour une nouvelle boisson ; si on lui en achète, elle offre un sac de courses. “Je m’excuse, je voudrais vous offrir un sac de courses car vous aidez cet homme qui est toujours dehors à faire l’aumône.”
Et là, la conscience s’élargit et reconnaît dans ton geste la valeur qui le rend vrai...

Luisella, Milan