Les pages déchirées

En apprenant que quelqu’un avait autant appréciée la revue - sans qu’on lui ait rien expliqué -, cela m’a donné envie de pleurer, comme si j’étais dans le désert, assoiffée, et que j’avais trouvé une source

Je suis dentiste. En décembre dernier, j’ai anesthésié une patiente et lui ai donné la revue de CL à lire en attendant que l’anesthésique agisse. Comme elle n’avait pas eu le temps de finir un article, je lui ai prêté la revue. Après les vacances de Noël, je l’appelle pour lui confirmer un rendez-vous et lui demande de me rapporter la revue. Elle me la rapporte dans un sachet et me dit toute gênée : « Il est arrivé quelque chose de terrible ! » Elle me montre que la couverture de la revue est tachée de peinture noire, en expliquant : « Mon mari a lu la revue pendant qu’il était en train de repeindre la voiture » et elle ajoute : « Ce n’est pas le pire… Il a déchiré quelques pages d’un article qu’il avait aimé, pour les montrer à un ami ! »
Je sais que la revue est bonne mais, en apprenant que quelqu’un l’avait autant appréciée - sans qu’on lui ait rien expliqué -, cela m’a donné envie de pleurer, comme si j’étais dans le désert, assoiffée, et que j’avais trouvé une source. Je l’ai embrassée, je lui ai dit que son mari était un homme intelligent et qu’elle pouvait garder la revue… enfin, ce qu’il en restait ! Mais je lui ai demandé quel article lui avait plu à ce point (je m’étais aperçue qu’il manquait des pages de la présentation du livre de Carrón aux États-Unis). Elle m’a répondu que tout lui avait plu, du début à la fin : « Mon mari voudrait savoir où il peut acheter la revue, ici au Mexique ». Elle avait déjà consulté internet pour s’informer. Je lui ai dit que l’on devait s’abonner et, lors du rendez-vous suivant, elle m’a apporté le montant de l’abonnement.

Cecilia, Oaxaca (Méxique)