Aix-en-Provence

Aix-en-Provence. Ma vie est infinie

La Journée de début d’année des communautés de CL du sud-est de la France. Une question irrépressible. Et la redécouverte qu’« une Présence est un visage riche de proposition »

Lors de la journée de début d’année pour le Sud de la France, tandis que nous chantions "The things that I see" (Bay Ridge Band, 1999), je me suis demandé si quelqu’un ne nous connaissant pas était venu vivre ces deux jours avec nous, ne se serait pas posé la question, à un certain moment : « Mais qui sont-ils? ».

Qui sont ces personnes chantant sans arrêt tant en anglais qu’en français en italien, en espagnol ou en portugais et même en latin?
Qui sont ces personnes venant de Toulouse, passant plus de quatre heures en voitures, sans connaître personne ni même savoir ce qui s’y déroulera, poussées seulement par un élan, qui, « même s’ils ne connaissent personne, les fait se sentir à la maison, comme s’ils étaient avec de vieux amis » ?
Qui sont ces personnes clamant d’avoir découvert un « lieu rare »: l’Ecole de communauté?
Qui sont ces personnes vivant la communauté comme leur « propre famille » ; comme « un lieu les aidant à aller au fond des choses »?
Qui sont ces personnes qui sentant le besoin de se demander « qu’est-ce qui résiste à l’impact du temps ? » dans un monde présentant toujours plus de difficultés à reconnaître qui est homme et qui est femme ?
Qui sont ces personnes affirmant avoir compris que la vie a un sens « depuis qu’ils ont ouvert leur cœur et qu’ils ont découvert ce qu’est la foi » ?
Qui sont ces personnes certaines de « ne se sentir jamais seules », car elles ont toujours la possibilité de rencontrer un ami ?
Qui sont ces personnes revenant après 23 ans d’absence, car il leur est toujours possible de «rencontrer le Christ dans toute personne » ?
Qui sont ces personnes se demandant encore si dans l’incendie de Notre-Dame n’a pas brûlé « une de nos émotions ou le signe de notre appartenance » ?

C’est la question que je n’ai pu contenir en voyant ces amis rassemblés ici. Tous ces visages connus à travers tant d’événements vécus ensemble, connus au point de pouvoir les nommer un par un. Néanmoins, retrouver ces visages toujours nouveaux et vivants m’a rempli de surprise. La surprise de s’être tous retrouvés pour recommencer une nouvelle fois à regarder le Christ : centre affectif de notre humanité.

Ce n’est pas une secte où il y aurait un dedans et un dehors, un bien et un mal. Etre « aimanté » par sa Présence à l’intérieur de cette compagnie, m’aide à rester toujours pauvre. Ou comme le disait T.S. Eliott dans « Le Roc » : « bestial comme toujours » c’est-à-dire profondément ancrés dans les vicissitudes de la vie, avec toutes les limites que je peux avoir. Mais en restant toutefois pauvre, car cette compagnie m’aide à ne jamais oublier d’être mendiant de Sa présence.

Je me surprends après tant d’années de cheminement dans cette compagnie, après tant de gestes qui pourrait apparaître comme identiques, qu’aucune fatigue ni aucunes difficultés ne me sont épargnées. De fait, cela devient même l’occasion, comme le rappelait le père Filippo Belli au cours de son témoignage, de redécouvrir qu’« une Présence est un visage riche de proposition » .
Avoir la possibilité de retourner dans ce lieu, m’offre la possibilité de profiter de cette « imprévisibilité », d’être à nouveau surpris par le fait que ma vie est vraiment une histoire sans fin, qu’elle est, oserais-je même dire, infinie.

Silvio, Aix-en-Provence