La lumière de l’enfant Jésus

L'image de l'affiche de Noël 2014
Giuseppe Frangi

Vers la fin de la première décennie du XVIIe siècle, une poignée d’artistes d’Utrecht, aux Pays-Bas, arrivèrent à Rome, appelés par des
commanditaires ; ils furent vivement impressionnés par le caravagisme. Parmi eux se trouvait Gerrit van Honthorst, qui restera dans l’histoire sous le surnom italien de Gherardo delle Notti. Surnom qui n’a pas besoin d’explication : L’Adoration des bergers, aujourd’hui conservé au musée des Offices à Florence, est très emblématique d’un style qui joue sur les effets spéciaux des scènes de nuit. Cette toile de grandes dimensions a une histoire. Elle fut réalisée en 1620 à Florence, sur commande du noble Piero Guicciardini, pour la chapelle majeure de Santa Felicita (où est conservée la célèbre Déposition de Pontormo). En 1836, le directeur du musée des Offices, prétextant l’obscurité de l’endroit où était exposée la toile, convainquit les héritiers de Guicciardini de la céder aux Offices pour qu’elle jouisse d’une meilleure exposition. En 1993, alors qu’elle était présentée sur le palier d’un escalier qui donne sur la rue des Georgofili, elle fut touchée de plein fouet par l’onde de choc de la bombe déposée lors de l’attentat du 27 mai.
Aujourd’hui, ce qui reste de la toile, comme le dit le titre d’un livre dédié à sa restauration, n’est plus qu’un « fragment lyrique ». L’image concerne donc un tableau dont il existe aujourd’hui seulement une trace (même si une copie est conservée au Wallraf Museum de Cologne). On y reconnaît l’œuvre d’un caravagiste qui a opté pour une utilisation de la lumière, bien différente de celle du maître. Ici, la source lumineuse est l’Enfant lui-même, selon une solution très heureuse, introduite un siècle auparavant par Le Corrège. La beauté de la composition ainsi que la délicatesse des regards et des gestes (en particulier celui de Marie, qui soulève le drap pour montrer son Fils aux bergers) sont d’un très heureux effet, particulièrement prisé et largement diffusé. Roberto Longhi, grand historien d’art et véritable « inventeur » du Caravage, l’appréciait beaucoup. Il avait dans sa collection une version réduite et intime du même sujet.