Un hashtag pour aider

La campagne des tentes de Noël met en avant huit projets. Les réfugiés, les orphelins de la guerre en Ukraine, les jeunes kényans auxquels on apprend un métier… Ces urgences ne sont pas nouvelles, mais elles sont de plus en plus dramatiques.
Paola Ronconi

Ce ne sont pas de nouvelles situations de besoin qui ont été saisies par l’AVSI pour la campagne des Tentes 2016 : #RéfugiésMigrants. Au travail pour changer de rythme. Mais les urgences sont encore là, plus dramatiques que jamais : réfugiés, personnes obligées de fuir parce que les conditions de leur pays ne permettent pas d’avoir une vie digne. Des personnes à aider chez elles, pour commencer un travail ou pour en enseigner un depuis le début, pour pouvoir racheter une vie et lui redonner une dignité. L’hashtag de cette collecte de fonds nous dit à quel point, aujourd’hui, on veut faire la distinction entre les réfugiés et les migrants ; l’AVSI aussi le sait bien, mais elle veut aller plus loin en aidant, si possible chez eux, ceux (tous ceux) qui sont en difficulté, avant qu’ils ne se mettent en route. Sinon, là où ils arrivent, par exemple en Italie. Cette année, il y a huit projets, mais l’aide concrète au peuple syrien dans la tourmente est peut-être la plus urgente. Les chiffres sont terrifiants : depuis le début de la guerre, de 2011 à nos jours, il y a eu 400 000 victimes, 2 millions de blessés, dont beaucoup de mutilés. Mais il y a plus de personnes qui ont perdu la vie par manque de soins que de morts dus à la guerre, aux mortiers ou aux éclats d’obus. Aujourd’hui, 13,5 millions de Syriens ont besoin d’aide ; parmi eux, 11,5 millions n’ont pas accès aux soins médicaux et 40% sont des enfants. À Damas, plus d’un million de personnes n’arrivent pas à payer l’assistance médicale. À Alep, ils sont plus de deux millions. D’autres données pour mieux “voir” la crise humanitaire de ce pays du Moyen Orient : le personnel de santé a émigré en masse ; de nombreuses usines pharmaceutiques ont été détruites ; s’il y a encore du matériel qui fonctionne dans les hôpitaux, il n’est pas sûr qu’il y ait des techniciens en mesure de les utiliser et de les réparer, ou que l’on puisse trouver des pièces de rechange ; et ce n’est pas sûr non plus qu’il y ait toujours un approvisionnement en électricité, eau potable, ou systèmes sanitaires.

VIE QUOTIDIENNE
Les images auxquelles nous ont habitué les mass médias nous reviennent à l’esprit. Mais au-delà de ces atrocités, il y a une réalité quotidienne et banale qui fait moins la une
 : que l’on pense seulement au manque de sages-femmes pour les 300 000 grossesses annuelles. Ou à ceux qui souffrent d’une maladie chronique et qui n’arrivent pas à avoir un suivi dans l’assistance médicale et pharmacologique. Ou aux 600 000 personnes qui souffrent de troubles mentaux graves dans le pays, pour lesquels seulement 10% des centres hospitaliers (de ceux qui fonctionnent encore) offrent des soins de base. En Syrie, il y a quatre hôpitaux gérés par des institutions catholiques ou qui font référence à la doctrine sociale de l’Église : l’hôpital Saint Louis et l’hôpital Al Rajaa à Alep ; l’hôpital français et l’hôpital italien à Damas. C’étaient des personnes et des familles au revenu moyen ou élevé qui s’adressaient à eux, puisqu’ils sont payants. Bien qu’ils aient d’excellentes capacités de soin, et puissent offrir une assistance dans toutes les spécialités médicales ainsi que des services de support clinique et technique, à présent ils fonctionnent à moins de 50% de leur potentiel en raison de problèmes économiques, des frappes de la guerre et du manque de personnel sanitaire bien formé. Monseigneur Mario Zenari, nonce apostolique en Syrie depuis 2008, et nouveau cardinal, les qualifie de « fleur à la boutonnière des œuvres de Miséricorde de l’Église syrienne, qui se présente comme celle qui, à la demande du Christ, est envoyée pour soigner aussi bien les âmes que les corps ». « C’est pour répondre à une invitation du Nonce que nous avons décidé de financer ces quatre hôpitaux, pour faire en sorte qu’ils puissent donner des soins gratuitement », explique Giampaolo Silvestri, secrétaire général de l’AVSI. Couverture des coûts de fonctionnement et des salaires des médecins, mises à jour technologiques et formation du personnel. « Dans chaque hôpital, il y aura un collaborateur de l’AVSI qui devra certifier l’état de pauvreté des personnes qui demandent une assistance, sur la base de critères de vulnérabilité bien déterminés ». L’Année de la Miséricorde vient de se terminer, mais ce mot “miséricorde” ne décrit rien d’autre que « l’engagement de l’Église qui dure depuis 2 000 ans », dit le nonce Zenari ; « après tout, le premier médecin des âmes et des corps, ce fut Jésus ».


CARTE DES PROJETS (EN DEHORS DE LA SYRIE)


CÔTE D’IVOIRE. Des maîtres artisans.
On peut sortir de la pauvreté et améliorer ses conditions de vie même en étant couturière. En Côte d’Ivoire, c’est ce que l’AVSI essaye de faire en organisant des cours de formation pour des activités artisanales, en fournissant du matériel, en élargissant le micro crédit. Et en soutenant et en favorisant l’accès aux services éducatifs pour les enfants de ces artisans locaux (5 000 personnes) et pour leurs familles.

BURUNDI. Jamais plus violées.
Sortir du tunnel de la peur et repartir. C’est le but du projet au Burundi, pour aider des milliers de femmes victimes de la violence. Il s’agit de guérir des blessures (physiques et psychologiques) ; aider la naissance d’une mentalité nouvelle dans les écoles et dans les communautés, et surtout dans les familles ; garantir un logement et l’assistance juridique. Tout cela est déjà une réalité au centre Meo de Bujumbura.

KENYA. Formations professionnelles.
Enseigner un travail et orienter les jeunes. Au St. Kizito Vocational Training Institute de Nairobi, les cours de mécanique, de menuiserie, de coiffure ou d’informatique sont une façon d’essayer de s’insérer dans le marché du travail. Le projet ne concerne pas seulement les jeunes Kenyans, mais aussi les réfugiés du Sud Soudan et de la Somalie ainsi que leurs familles, pour qu’ils puissent retourner dans leur pays avec de véritables perspectives.

UKRAINE. Avec les orphelins de guerre.
En Ukraine, en dehors des besoins matériels, la grande difficulté que vit le pays est la haine réciproque, entre ceux qui défendent l’armée ukrainienne et les séparatistes. Le conflit, qui a commencé en 2014, est en train de laisser derrière lui des réfugiés, des traumatismes et un climat de défiance. Le projet cherche à aider les familles et les orphelins, aussi bien par des aides matérielles et psychologiques que par des activités culturelles et de socialisation pour apprendre à vivre ensemble.

ITALIE. Service d’accueil.
Le projet des Tentes soutient l’œuvre de tout premier accueil que gère la Fondation Projet Arche à la gare de Milan pour les réfugiés en transit. Il y a énormément de femmes, mais aussi des enfants et des mineurs non accompagnés dont il faut s’occuper et auxquels il faut donner des vivres, une assistance médicale et un début d’orientation. Avant tout pour l’enregistrement et les déplacements dans les différents centres d’accueil.

ITALIE. Bourse de travail.
Avec le soutien de Caritas Ambrosienne et de Se Faire Proche, le cœur de ce projet est le travail. Et donc la possibilité d’être autonome. Au moyen des cours de formation, on offre aux réfugiés arrivés en Italie un chemin pour apprendre une profession. Dans quels domaines ? La restauration et l’agriculture, mais aussi les secteurs vestimentaire et hôtelier. Pour essayer de recommencer.

LIBAN ET JORDANIE. Défi éducatif.
La crise du Moyen Orient a poussé vers le Liban et la Jordanie des centaines de milliers de Syriens. À présent ce sont des réfugiés et un très grand nombre d’entre eux sont des enfants. L’AVSI veut en aider 35 000 à aller à l’école ; donner aussi aux plus âgés la possibilité d’apprendre un travail (grâce à sept écoles d’agriculture gérées par l’AVSI), et fournir des services aux familles les plus pauvres.