Une autre Histoire de la Laïcité

Dans son livre dernier, Une autre Histoire de la Laïcité, Jean-François Chemain montre, à travers une approche historique, qu’il faut totalement renverser la perspective habituelle
Jean-François Chemain

Il est convenu de dire que la « laïcité » serait le résultat de l’émancipation de l’Etat par rapport à la tutelle de l’Eglise, une conquête du premier sur la seconde, dont l’époque charnière aurait été la Révolution française…
Personne ne peut remettre ce dogme en question. Une conquête si chèrement acquise obligerait en outre l’Eglise à se taire sur tous les sujets touchant, de près ou de loin, à la politique, c’est-à-dire à peu près tous.
Dans son livre dernier, Une autre Histoire de la Laïcité, Jean-François Chemain montre, à travers une approche historique, qu’il faut, pour être juste, totalement renverser cette perspective. Ce n’est pas l’Etat qui s’est, depuis deux siècles, libéré de l’Eglise, mais l’Eglise qui s’est, dans un combat de deux millénaires, affranchie de la domination du Politique. Cette domination commence avec l’Etat impérial romain et ses héritiers carolingien, byzantin, germanique ou napoléonien. Elle se poursuit avec le renforcement des monarchies nationales, qui est souvent allé de pair avec des schismes d’origine plus politique que religieuse (orthodoxe, protestant, anglican). Elle a voulu se renforcer avec la République qui, dès la Révolution française, a tenté d’imposer des vues religieuses n’ayant rien à voir avec la séparation de l’Eglise et de l’Etat : athéisme, nouvelle religion (celle de l’Etre Suprême), catholicisme d’Etat enfin.
Pour mieux faire taire l’Eglise, les Etats lui ont imputé toute une série de crimes (Inquisition, guerres de religions…) qu’ils ont exagéré et, la plupart du temps, eux-mêmes commis.
Toute une construction intellectuelle, d’une parfaite cohérence, a été échafaudée, notamment en France, pour discréditer une Eglise catholique qui s’est toujours refusée à n’être que l’instrument de l’Etat. Nous ne saurions nous en étonner : saint Augustin a montré que la Cité des Hommes (le pouvoir politique) déteste la Cité de Dieu (l’Eglise) de la même haine jalouse que Caïn voua à son frère Abel, que Dieu lui préférait.
Ce n’est pas une raison pour ne pas rétablir la vérité en démontant cette construction mensongère. L’enjeu en est important, à une époque où le message de l’Eglise est attendu par une société de plus en plus désespérée, et où d’autres religions, porteuses d’autres valeurs que celles de notre civilisation chrétienne, occupent l’espace laissé vide par le christianisme. Tel est le but que se fixe le livre de Jean-François Chemain, Une autre Histoire de la Laïcité.